Vague de prière pour le jeudi 25 avril 2024

Le 19 avril, la défense aérienne iranienne a abattu des drones au-dessus d'Ispahan, selon les médias iraniens officiels. Cela a encore fait monter les tensions régionales après les représailles iraniennes contre Israël suite à une attaque contre des bâtiments diplomatiques iraniens en Syrie. L'intervention d'Israël s’est produite après que les États-Unis auraient approuvé un projet israélien d’attaque contre Rafah, dans la Bande de Gaza, en échange de l’accord d'Israël de ne pas lancer une attaque militaire générale contre l'Iran. Entre temps la Bande de Gaza continue à être bombardée, et le nombre de morts y augmente d’heure en heure.

Prince de la paix, alors que beaucoup d'entre nous craignent de nouvelles escalades militaires régionales, aide-nous à ne pas oublier tes précieux enfants de Gaza qui continuent de souffrir terriblement. Seigneur, comme elles sont horribles, ces puissances impériales qui se servent de la vie des Palestiniens comme de pions pour maintenir un statu quo de violence permanente ! Nous voulons de notre côté continuer à croire que tu es un Dieu juste, et nous souvenir de ces paroles du prophète Isaïe : « Quel malheur pour ceux qui établissent des règles injustes, qui mettent par écrit des lois qui causent la misère des autres. De cette façon, ils empêchent les pauvres d’être jugés avec justice, ils privent de leurs droits ceux qui, dans mon peuple, sont sans défense. Ils volent les veuves, ils pillent les orphelins » (Ésaïe 10.1-2). Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Le 18 avril, la professeure Nadera Shalhoub-Kevorkian a été arrêtée à son domicile dans la Vieille ville de Jérusalem, soi-disant pour incitation au terrorisme, à la violence et au racisme. Lors de son arrestation, la police a également confisqué son téléphone portable, son ordinateur, toutes sortes de documents et des livres de l’auteur américano-palestinien Mahmoud Darwish. Cette arrestation a eu lieu suite à une campagne menée par des étudiants, des militants de droite et divers politiciens. La professeure Shalhoub-Kevorkian a ensuite été remise en liberté, en attendant de nouveaux interrogatoires.

Ô Divin créateur, nous sommes inquiets et en colère suite à l'arrestation de la professeure Shalhoub-Kevorkian, une arrestation qui viole autant le droit à la liberté d'expression que la liberté académique, et nous te sommes en même temps reconnaissants pour les courageux penseurs palestiniens qui, par leur militantisme et leurs publications, osent défier les structures d’injustice. Rappelle-nous, Seigneur, que notre amour pour toi doit se vivre de tout notre esprit, et s’il te plaît : Protège la professeure Shalhoub-Kevorkian et défends-la contre toute fausse accusation et contre toute calomnie. Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Ce 24 avril, Sabeel organise son 4ème webinaire en vue de sa Conférence internationale de novembre 2024 dont le thème sera« Défier l’apartheid et l’extrémisme religieux ». Ce webinaire, sur le thème « Christophobie et persécution des chrétiens », veut montrer comment le sionisme chrétien exacerbe les tensions dont sont victimes les chrétiens palestiniens. Il donnera la parole à des experts tels que le Révérend Dr Waltrina Middleton, le rabbin Brant Rosen et le Révérend Dr Paul McAllister.

Ô Dieu incarné, dans la grande tradition prophétique du christianisme palestinien, Sabeel résiste depuis des dizaines d’années au sionisme chrétien. Alors que ton nom continue à être invoqué dans un contexte de suprémacisme et de haine qui défigure ta dimension d’inclusivité et de justice, les pierres vivantes que nous sommes souffrent beaucoup des attitudes de nos coreligionnaires sionistes chrétiens et nous ne pouvons que les exhorter à se repentir. Que ce webinaire nous rappelle que « Celui qui a de la haine pour son frère se trouve dans l’obscurité ; il marche dans l’obscurité et ne sait pas où il va, parce que l’obscurité l’a rendu aveugle » (1 Jean 2.11). Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Rencontre autour du livre de Munther Isaac "L'autre côté du mur", Paris 22 mars 2024

COMPTE-RENDU DE LA RENCONTRE DU 22 MARS 2024

Munther Isaac, L’Autre Côté du mur - Un récit chrétien palestinien de lamentation et d’espoir, traduit et édité par Amis de Sabeel France, diffusé en partenariat avec Editions Golias, 2023.
Présentation et analyse par Nicolas Guérin, prêtre catholique et Patrice Rolin, pasteur protestant, théologien et bibliste.

I. Introduction de Laurent Baudoin, traducteur du livre en français

Depuis près de six mois, les habitants de la bande de Gaza vivent une tragédie qu’on peut qualifier de génocide, à l’instar de la Cour Internationale de Justice et de la plupart des observateurs et des organisations des droits humains. Le scandale est d’autant plus grand que l’auteur de ce crime, l’Etat d’Israël, se refuse à appliquer les injonctions de la Cour Internationale dans son ordonnance du 26 janvier 2024, qui demande que tout soit fait pour éviter le génocide. En empêchant l’acheminement et la répartition de l’aide humanitaire, Israël soumet les Gazaouis à la famine, utilisée comme arme de guerre, une stratégie d’une cruauté inimaginable.Face à ce drame qui bouleverse la conscience humaine, les dirigeants occidentaux tergiversent et les Eglises se taisent ou réagissent avec lenteur et parcimonie. Aussi les croyants doivent-ils se poser la question : qu’aurait dit, qu’aurait fait le Christ en pareille circonstance ? Le silence est-il chrétiennement acceptable ?
Elever la voix, expliquer et informer sur l’injustice vécue par le peuple palestinien depuis des décennies voire siècle, c’est ce qu’a entrepris, bien avant le 7 octobre 2023, le théologien Munther Isaac, pasteur de la paroisse luthérienne de Noël à Bethléem, et figure reconnue du mouvement Sabeel qui porte la voix des chrétiens palestiniens en Terre sainte et à l’extérieur, dans le sillage de la théologie de la libération.
Son livre,
L’Autre Côté du mur, est un vibrant plaidoyer pour ces chrétiens palestiniens, méconnus voir méprisés par les chrétiens occidentaux, alors que, bien que très minoritaires mais très respectés par les Palestiniens musulmans, ils ont beaucoup à nous apprendre sur la foi qui, telle une lumière dans l’obscurité de l’oppression, révèle toute la force de sa promesse.
Nicolas Guérin et Patrice Rolin ont bien voulu associer leurs voix pour nous parler de ce livre majeur.

II. PRESENTATION DES CHAPITRES

Introduction (Nicolas Guérin)

Distance et euphémisation. La réalité, même si elle est à distance, c'est vraiment la réalité, le cri est un cri, le mur est un mur. C'est ça que l'auteur nous demande d'écouter et d’accueillir. Le cri est l'expression d'une souffrance ; qu'en faisons-nous ici, avec la proximité de Jésus comme source de résistance non violente ? C’est ce que nous allons voir.
Le cri est une interpellation à connaître, à mieux comprendre, à compatir, à conjuguer foi, justice et paix.

Chapitre 1 : Une invitation (Nicolas Guérin)

Le chapitre commence par cette phrase étonnante : « C’est parce que vous êtes palestinien ! » Et alors ? Cette phrase, qui en dit déjà long, est celle que l'auteur a entendue comme argument donné par les organisateurs d'une conférence de la mission chrétienne en Irlande pour lui refuser de prendre la parole. C'est la question de son existence même, de son appartenance à la Palestine qui est signifiée ici. Il n'y a rien de plus basique qu’une phrase pareille. Alors, se demande-t-il, Dieu nous aime-t-il autant que les autres ? Est-ce que Dieu aime les Palestiniens ? Quelle est la place des Palestiniens dans le plan de Dieu ? A cela s’ajoute ce qu'on entend beaucoup : la menace démographique car, pour certains, les Palestiniens sont trop nombreux, etc.

L'auteur nous propose l'histoire de son parcours de vie et la découverte du sens de sa vocation. Il est chrétien, arabe, palestinien, pasteur, luthérien évangélique, ça fait beaucoup… Autant d'étiquettes c'est parfois dangereux, cela peut constituer autant de barrières. « Arabe », précise-t-il, dit la langue et la culture, mais pas directement l'ethnicité ou la religion. « Palestinien » dit la terre, le pays, le peuple. On verra que ceux qui utilisent ces catégories le font avec des acceptions parfois différentes voire des confusions. Munther Isaac dit que son espoir, c'est de sortir de l’opposition mortifère exclusive d’Israël et de la Palestine pour qu’Israéliens et Palestiniens puissent un jour partager cette terre.

Il donne ensuite un aperçu rapide de l'histoire des Palestiniens sur cette terre, avec entre autres cette conclusion que le fait d'avoir été occupé est un élément crucial pour comprendre l'identité palestinienne. Aujourd'hui tous les Palestiniens, quel que soit leur statut, sont sous occupation israélienne. En Israël même, où ils sont 1,8 million (20 % de la population), ils sont considérés comme des citoyens de seconde classe. Dans les territoires occupés où ils sont 4,8 millions, tout est problématique, tout est contrôlé par Israël : la terre, l'eau, la sécurité...

L’injustice et l'inégalité décrivent la vie en Palestine aujourd'hui. L’auteur a grandi à Bethléem. Il avait 8 ans lors de la première intifada en 1979, et 20 ans lors de la 2e Intifada. L'enfant et le jeune homme ont connu l’invasion, les fusillades, le couvre-feu, les milliers de morts et de blessés ; tout cela a constitué un tournant dans sa vie. Comment dès lors donner du sens à sa religion, à sa foi ? Il grandit à Bethléem dans une petite église évangélique très désengagée du monde de l'époque. Au Moyen-Orient – comme ailleurs – la politique et la religion sont étroitement liées, avec des revendications de toutes sortes pour la possession de la terre, des prétentions fondamentalistes juives d'un côté, palestiniennes de l'autre, sans compter les chrétiens sionistes, en particulier les évangéliques américains. D’où le mur de 8 mètres de haut justifié par des raisons de sécurité, en fait un non-sens qui sert à l'accaparement des terres. En conséquence, les Palestiniens deviennent invisibles, comme inexistants, déshumanisés, d'où l'invitation à aller de l'autre côté du mur. L'autre côté du mur, c'est d'abord une invitation à écouter.

Vague de prière pour le jeudi 18 avril 2024

Le 13 avril, l'Iran a lancé des centaines de drones et de missiles en direction d'Israël après avoir annoncé des représailles suite à l’attaque meurtrière israélienne contre son consulat à Damas, la capitale de la Syrie. La quasi-totalité des missiles et des drones a été interceptée, mais une fillette de 7 ans, Amina al-Hassouni, a été grièvement blessée par des éclats de missiles et une base aérienne israélienne a été légèrement endommagée. Beaucoup craignent qu’une réponse d'Israël à l'attaque iranienne ne dégénère en un conflit régional majeur.

Dieu de la paix, beaucoup d'entre nous ont peur qu’une guerre n’éclate sur toute la région. S’il te plaît, guéris les blessures de la jeune Amina, et que ta présence réconforte sa famille. Seigneur, interviens auprès de ceux qui sont en position de pouvoir prendre des décisions, afin qu’ils mettent rapidement en place les bases d'une paix juste et globale pour toute la région. Et aide-les à comprendre que cela n’est possible qu’en mettant un terme à la souffrance des Palestiniens. Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Le week-end dernier, des centaines de colons israéliens armés ont pris d'assaut des villages de Cisjordanie et y ont incendié des maisons et des voitures, tuant au moins deux personnes et en blessant beaucoup d’autres. Cela a été l'une des plus importantes attaques menées par des colons cette année. Ils voulaient venger la mort d’un jeune colon de 14 ans qui avait été retrouvé mort en Cisjordanie. Depuis le 7 octobre, les raids de colons et de soldats israéliens contre les villes et les villages de Cisjordanie n’ont cessé de se multiplier, tuant des centaines de Palestiniens.

Dieu de la justice, nous sommes tristes à cause de tous ceux qui ont été tués par des actes de violence et de haine. Le sang de tant de personnes coule sur notre terre. Aide-nous, Seigneur, à comprendre la raison de toutes ces tragédies et à résister à toute violence. Rends chaque personne et chaque organisation consciente de ses propres responsabilités dans les situations d’injustice que connaît la Cisjordanie, et accompagne ceux qui vivent un deuil et qui ont peur. Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.

Début avril, un groupe de colons israéliens accompagné d’officiers de police israéliens a pénétré dans le Quartier arménien de la Vieille ville de Jérusalem, où règnent de fortes tensions suite à la location par un investisseur juif australien de l’espace connu comme le « Jardin des vaches ». Les colons et les policiers se sont alors mis à agresser des Arméniens et à vandaliser leurs propriétés. Les tensions qui existent depuis plus de deux ans ont connu une recrudescence ces dernières semaines. Les membres de la communauté arménienne affirment que la perte de l’espace du « Jardin des vaches » constituerait une menace existentielle pour l’avenir de leur communauté et porterait atteinte de manière irrémédiable à la diversité de la ville de Jérusalem.

Dieu d'inclusion, la beauté de notre peuple est comme une mosaïque aux multiples couleurs, mais le suprémacisme et l'exclusivisme menacent de détruire le dynamisme de notre société. S’il te plaît, interviens et mets fin aux agressions de la police et de la municipalité israéliennes et à celles des colons : elles sont une menace existentielle pour l’avenir de la communauté arménienne locale. Donne de la joie et une inébranlable détermination à la communauté arménienne de Palestine là où elle s’oppose à sa propre élimination. Seigneur, dans ta miséricorde, entends notre prière.